Comment la science nucléaire aide les fruits et légumes à survivre et prospérer

De la semence à l’assiette, le parcours des fruits et légumes est long et jalonné d’obstacles : changements climatiques, ravageurs et maladies, pollution des sols et de l’eau, désertification et finalement des contrôles poussés pour vérifier qu’ils peuvent être consommés et exportés. Face à toutes ces contraintes, la science nucléaire offre des solutions efficaces et avérées.

Grâce aux techniques nucléaires, des plantes peuvent pousser dans les conditions climatiques difficiles du Nigeria. (Photo : Fasina Abayomi/Université fédérale d’Oye Ekiti, Nigeria)

De la semence à l’assiette, le parcours des fruits et légumes est long et jalonné d’obstacles : changements climatiques, ravageurs et maladies, pollution des sols et de l’eau, désertification et finalement des contrôles poussés pour vérifier qu’ils peuvent être consommés et exportés. Face à toutes ces contraintes, la science nucléaire offre des solutions efficaces et avérées.

En coopération avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’AIEA utilise les techniques nucléaires pour aider les pays à produire des fruits et des légumes dans des environnements difficiles. Elle aide également les pays à respecter et à maintenir les exigences internationales de sécurité alimentaire pour conserver et élargir leurs marchés d’exportation.

Techniques nucléaires pour des plantes plus résistantes

Depuis 2009, la FAO et l’AIEA aident plus de cent pays à renforcer leur capacité d’améliorer la production et la sécurité alimentaires à l’aide de la sélection par mutation végétale, utilisant l’irradiation pour produire des variétés végétales de meilleure qualité et à rendement plus élevé, ou plus résistantes au changement climatique et aux stress environnementaux. En 2021, le Centre mixte FAO/AIEA a fourni un appui technique pour la mise au point et l’homologation de 36 nouvelles variétés de plantes.

Depuis 2012, les scientifiques du Nigeria travaillent avec l’AIEA et la FAO pour aider les agriculteurs à utiliser des systèmes d’irrigation au goutte à goutte pour cultiver des plantes malgré des conditions climatiques défavorables et le changement de leurs conditions de vie. Cette coopération a commencé par la formation de 60 experts agricoles nationaux qui ont reçu des conseils et du matériel de laboratoire et de terrain.

Depuis, les experts nationaux forment des étudiants de l’Université fédérale d’Oye Ekiti à l’utilisation de la technique d’irrigation au goutte à goutte et à l’optimisation de l’utilisation des engrais et de l’eau pour les cultures. Il s’agit notamment de mieux comprendre comment contrôler l’humidité du sol et la quantité d’engrais nécessaire au moyen des isotopes. Les mesures et aident les agriculteurs à disposer de données en temps réel pour optimiser l’utilisation de l’eau.

Le Centre mixte FAO/AIEA étudie de nouvelles technologies qui permettront de mettre au point plus rapidement de nouvelles cultures mieux adaptées aux exigences de la sécurité alimentaire et au changement climatique. Il s’agit notamment de nouvelles sources de rayonnement, de technologies génomiques, de mégadonnées et d’intelligence artificielle.

Les techniques nucléaires à la rescousse des bananes

Selon la FAO, les bananes sont parmi les fruits les plus produits, les plus commercialisés et les plus consommés au monde. Quelque 150 millions de tonnes de bananes sont produites chaque année, principalement en Asie, en Afrique et en Amérique latine. Le commerce mondial des bananes a atteint des volumes sans précédent ces dernières années.

Une étude publiée en février 2022 par des scientifiques de l’AIEA, de la FAO et d’universités autrichiennes et belges met en lumière les méthodes recourant aux techniques nucléaires pour évaluer le stress dû à la sécheresse chez les bananiers à Arusha (Tanzanie). Ces méthodes, fondées sur l’évaluation de l’ampleur du stress, permettent aux agriculteurs de prendre des mesures préventives et protectrices.

Les scientifiques ont étudié les isotopes stables du carbone et la température des feuilles comme indicateurs potentiels du stress dû à la sécheresse chez les bananiers. Des recherches sur d’autres plantes montrent que les isotopes stables du carbone et la température des feuilles peuvent être utilisés pour mesurer le stress dû à la sécheresse.

L’étude montre également que les isotopes stables du carbone et la température des feuilles sont des indicateurs très sensibles du stress dû à la sécheresse chez les bananiers. Les résultats de l’étude ont permis aux scientifiques de mettre au point des méthodes adaptées au bananier, peu coûteuses et donc plus facilement applicables sur le terrain.

Sur la base de ces résultats, une formation a été dispensée à des chercheurs et à des agriculteurs dans le cadre du programme de coopération technique de l’AIEA. Ils y ont appris comment utiliser ces méthodes pour déceler rapidement les signes de stress dû à la sécheresse et améliorer les pratiques agronomiques de culture de la banane.

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Une scientifique et un partenaire local discutent de la technologie d’échantillonnage en Tanzanie. (Photo : S. Ramadhani)

Les techniques nucléaires contre les ravageurs des cultures

La culture et l’exportation des agrumes jouent un rôle important dans l’économie du Maroc, mobilisant plus de 13 000 agriculteurs et travailleurs agricoles et générant 300 millions de dollars d’exportations par an, mais un insecte ravageur menace la croissance et la prospérité du secteur : la mouche méditerranéenne des fruits.

En coopération avec la FAO, l’AIEA a aidé le Maroc à remporter sa première victoire dans le combat qu’il livre à cet insecte. Dans le cadre d’un projet technique de l’AIEA, des experts marocains ont reçu la formation et le matériel nécessaires pour détecter et contrer les incursions d’autres ravageurs, condition préalable à l’élimination de la mouche méditerranéenne des fruits au moyen de la technique de l’insecte stérile (TIS), une technique nucléaire peu coûteuse et respectueuse de l’environnement, qui repose sur la production d’insectes, leur stérilisation en masse et des lâchers répétés dans les zones infestées. En l’absence de système tenant les autres ravageurs à l’écart, si la TIS parvient à éliminer la mouche méditerranéenne des fruits, c’est une autre espèce qui la remplacera dans les vergers d’agrumes.

En 2021, la FAO et l’AIEA ont publié un document de plus de 1 200 pages intitulé Sterile Insect Technique : Principles and Practice in Area-Wide Integrated Pest Management (Technique de l’insecte stérile - Principes et pratique de la gestion intégrée des ravageurs à l’échelle d’une zone), qui décrit les progrès accomplis dans l’utilisation d’une technique nucléaire pour lutter contre les insectes ravageurs et les dernières évolutions de l’utilisation de la TIS, notamment au plan économique, environnemental et de la gestion.

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Les espèces de mouches des fruits envahissantes, dont la mouche orientale des fruits (Batrocera dorsalis, Hendel), menacent l’économie du Maroc. (Photo : A. Rodriguez)

Les techniques nucléaires au service de la sécurité alimentaire

Le Centre mixte FAO/AIEA aide également les pays à répondre aux prescriptions de sécurité alimentaire pour l’exportation et à préserver la santé des consommateurs. À cette fin, il facilite la formation et le transfert de technologies nucléaires et isotopiques pour la détection des contaminants dans les aliments et l’irradiation des aliments après récolte. L’irradiation se fait au moyen de rayons gamma, de faisceaux d’électrons ou de rayons X, qui empêchent les insectes de se reproduire et de s’établir dans de nouvelles zones après l’exportation. C’est un moyen écologique de faciliter le commerce tout en répondant aux exigences des importateurs en matière de sécurité alimentaire. Il est utilisé pour divers produits, notamment les fruits et les légumes.

En 2021, le Centre mixte FAO/AIEA a lancé un nouveau projet de recherche coordonnée pour étudier neuf groupes de ravageurs ayant une incidence considérable sur le commerce des fruits et légumes. Il a également aidé l’Algérie, entre autres pays, à améliorer ses capacités de détection des risques chimiques tels que les résidus d’antimicrobiens et de pesticides ainsi que les toxines naturelles présentes dans plusieurs aliments, dont les dattes. En 2020, l’Algérie était le sixième exportateur mondial de dattes, pour une valeur estimée à 129 millions de dollars.

En 2021, le Centre mixte FAO/AIEA a également aidé les agriculteurs du monde entier à développer des pratiques agricoles intelligentes face au climat (voir le PRC sur les gaz à effet de serre dans l’agriculture), à réduire l’utilisation des engrais, à lutter contre la désertification et à prévenir la contamination par les polluants présents dans les sols ou dans les eaux.

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Des scientifiques en Algérie effectuent des tests de dépistage de résidus chimiques sur des aliments, notamment des dattes, des œufs et du miel. (Photo : H. Irekti/INRAA)

Nuclear techniques for more resilient plants

Since 2009, FAO/IAEA collaboration has helped over a hundred countries enhance their ability to improve food production and security through plant mutation breeding, which uses irradiation to produce higher quality and higher yielding plant varieties, as well as varieties that have greater resilience to climate change and environmental stresses. In 2021, the Joint FAO/IAEA Centre provided technical support for the development and release of 36 new plant varieties during the year.

In 2021, Cuba, facing rising temperatures, changing rainfall patterns, longer periods of droughts and the intrusion of salty waters along coastal areas, harvested new crop varieties of tomato and soybean for the first time with improved yields thanks to this technique. These varieties followed 21 other crop varieties in previous years, including rice, green beans and a species of hibiscus, developed by Cuba's National Institute of Agricultural Science (INCA) in partnership with the Joint FAO/IAEA Centre, through breeding programmes using irradiation and biotechnology.

The Joint FAO/IAEA Center works to explore innovative new technologies to accelerate the pace at which new and improved crop varieties can be developed for food security and climate change adaptation. These technologies include the use of newer sources of irradiation, genomics technologies, big data and artificial intelligence.

Nuclear techniques to the rescue of bananas

Bananas are among the most produced, traded and consumed fruits globally, according to the FAO. About 150 million tons of bananas are produced per year, mostly in Asia, Africa and South and Central America, and their trade worldwide has expanded to unprecedented heights in recent years.

In late August 2021, the Andean countries of Bolivia, Colombia, Ecuador and Peru reached out to the IAEA for help in combatting the spread of the latest variation of the Banana Fusarium Wilt, the most lethal banana disease in the world. With the Joint FAO/IAEA Centre’s support, experts in South America have been using the nuclear-derived technique of polymerase chain reaction (PCR) – or DNA sequencing – for early detection of the disease in new areas, to help halt the spread.

To prevent future outbreaks, experts in the Asia Pacific region participating in a Coordinated Research Project of the Joint FAO/IAEA Centre have developed banana lines with resistance to disease using irradiation. One banana variety with resistance to the Fusarium Wilt was also developed through mutation breeding as part of the project last year.

Shortage of water is currently the most limiting factor for banana production worldwide, and with temperatures increasing due to climate change this is foreseen to get worse. In 2021, experts and PhD students took part in a research project at the Joint FAO/IAEA Centre on the use of stable isotopic techniques in assessing drought stress in banana crops. Their findings, which showed that stable carbon isotopes and leaf temperature were highly sensitive indicators for drought stress in banana, were published in Agricultural Water Management journal this month.

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In 2021, experts are seeing the Fusarium Wilt disease in many banana plantations across Latin America. (Photo: M. Dita/Biodiversity International, Colombia)

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Scientists discussed sampling technology with local partners in Tanzania. (Photo: S. Ramadhani)

Nuclear techniques for suppressing agricultural pests

Ecuador, whose fruit and vegetable export portfolio includes bananas, plantain, mangoes and more recently dragon fruit, tree tomatoes and goldenberries, kept pests under control last year by importing 3 million sterile male Mediterranean fruit flies each week from Guatemala. The male flies – sterilized by radiation with the Sterile Insect Technique (SIT), a type of birth control for insects – were released to mate with wild females, resulting in no offspring and a decline in the target insect population. The Joint FAO/IAEA Centre trained Ecuadorian agronomists to monitor and control the fruit fly populations using SIT within a framework of a National Fruit Fly Management Project. SIT has been used for over 60 years to suppress and eradicate agricultural pests such as the Mediterranean fruit fly.

To keep insect pests at bay, Mexico last year opened a new state of the art Mediterranean fruit fly facility with FAO/IAEA support, which produces one billion sterile flies a week. The facility’s establishment helps to consolidate the current pest containment barrier at Mexico's border with Guatemala, after the Mediterranean fruit fly eradication from Mexico in 1982.

Last year the  FAO and the IAEA also released a publication highlighting advances in use of nuclear techniques to fight insect pests titled ‘Sterile Insect Technique: Principles and Practice in Area-Wide Integrated Pest Management’. The 1200-page publication covers the latest developments in the use of the SIT in detail, including economic, environmental and management considerations.

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Tree tomato is now exported to markets in the United States, Latin America and the European Union. (Photo: AGROCALIDAD)

Nuclear techniques to support food safety

The Joint FAO/IAEA Center also helps countries to meet food safety requirements for export and to protect consumer health. It does this through training and technology transfer relating to nuclear and isotopic techniques, to support the detection of contaminants in food, and the post-harvest applications of food irradiation. Food irradiation involves gamma, electron beam or X ray irradiation that prevents insects from being able to reproduce and establish in new areas after export. It is a chemical-free way of enabling trade while meeting importers' requirements on food safety, and is used on a range of products including fruits and vegetables.

In 2021, the Joint FAO/IAEA Centre launched a new coordinated research project to study nine pest groups important for fruits and vegetable trade, and supported Algeria, among other countries, to enhance food safety analytical capabilities for the detection of chemical hazards, such as antimicrobial and pesticide residues and natural toxins in a range of foods, including dates. In 2020, Algeria was the world's sixth leading exporter of dates, worth approximately USD 129 million.

Last year, the Joint FAO/IAEA Centre also kept supporting farmers around the world to develop climate-smart agriculture practices (see CRP on greenhouse gases in agriculture), reduce the use of fertilizer, combat desertification and prevent contamination by pollutants present in the soil or water. It also kept helping internally displaced people in Nigeria grow cucumber, watermelon and okra with reduced water use.

Moving ahead to 2022, in July the IAEA will host its International Symposium on Managing Land and Water for Climate-smart Agriculture to further help countries improve agricultural practices for a range of crops including fruits and vegetables, within a changing climate.

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Scientists in Algeria conducting radioreceptor assay screening of foods including dates, eggs and honey for chemical residues. (Photo: H. Irekti/INRAA)