Comment les techniques nucléaires contribuent-elles à la mesure du changement climatique et à l’adaptation à celui-ci ?

Le nucléaire expliqué

Les techniques nucléaires et isotopiques peuvent nous aider à mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons.

(Image : A. Vargas/AIEA)

Les techniques nucléaires et isotopiques peuvent nous aider à mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons. Les données que nous collectons grâce à ces techniques peuvent aboutir à de meilleures politiques, fondées sur les recherches scientifiques, notamment en ce qui concerne le changement climatique. Nous pouvons étudier les systèmes terrestres et aquatiques à l’aide de diverses techniques nucléaires pour évaluer les effets du changement climatique sur l’environnement.

Ces techniques et outils permettent de surveiller les émissions de gaz à effet de serre tels que le dioxyde de carbone (CO2), l’oxyde nitreux (N2O) et le méthane (CH4) pour comprendre les changements environnementaux touchant les océans, les montagnes et leurs écosystèmes, et pour mettre au point des moyens d’adaptation aux pénuries d’aliments et d’eau aggravées par des conditions météorologiques changeantes.

« Les pays du monde entier comprennent de plus en plus l’intérêt d’utiliser les techniques nucléaires pour faire face aux diverses difficultés dues au changement climatique. Ils découvrent eux-mêmes combien les technologies promues par l’AIEA sont bénéfiques », déclare Najat Mokhtar, Directrice générale adjointe de l’AIEA chargée des sciences et des applications nucléaires.

Des données permettant l’identification, la surveillance et la gestion des sources d’émission de gaz à effet de serre sont collectées à l’aide de techniques isotopiques afin de comprendre leurs liens avec les changements qui surviennent sur terre, dans les océans et partout dans l’atmosphère. Voici comment.

Que sont les isotopes ?

Les atomes de chaque élément chimique comportent un nombre caractéristique de protons, de neutrons et d’électrons.

Les atomes possédant le même nombre de protons mais pas le même nombre de neutrons sont des isotopes, qui ont presque les mêmes propriétés chimiques mais pas la même masse ni les mêmes propriétés physiques. Il y a des isotopes stables — qui n’émettent pas de rayonnements — et des isotopes instables, radioactifs.

On utilise diverses techniques nucléaires pour mesurer les quantités et les proportions d’isotopes et pour déterminer leur origine, leur histoire, leurs sources et leurs interactions avec l’environnement. Ces mesures permettent aux experts de mieux comprendre le fonctionnement de divers écosystèmes.

Pour plus d’informations sur les isotopes et leurs utilisations, cliquez ici.

Réduire les émissions dans l’agriculture

Un quart des émissions de gaz à effet de serre proviennent de l’agriculture, notamment le CH4 et le N2O — un gaz 300 fois plus puissant que le CO2 en ce qui concerne le réchauffement climatique — rejetés par le bétail et les engrais chimiques. Non seulement l’excès d’engrais, devenu N2O, accentue le réchauffement climatique, mais il pollue également les sols et l’eau douce. Les techniques nucléaires permettent d’évaluer les émissions de gaz à effet de serre en quantité et en qualité.

Les isotopes peuvent aider à déterminer la quantité d’engrais que les plantes peuvent absorber et donc à réduire la quantité épandue et le volume de N2O libéré.

Pour plus d’informations, voir cet article sur la réduction des gaz à effet de serre grâce aux techniques nucléaires.

Renforcer la production végétale

Le changement climatique a engendré des conditions extrêmement sèches dans de nombreux pays, d’où l’importance de comprendre comment la sécheresse influe sur la croissance des cultures dans ces conditions nouvelles et d’aider à trouver des moyens d’économiser l’eau. Voir De l’importance de l’eau.

Les isotopes servent à évaluer l’état et le mouvement souterrain des eaux pour comprendre comment produire des récoltes solides dans des conditions changeantes. Ils aident les communautés à s’adapter aux sécheresses et à bien utiliser des méthodes moins onéreuses et plus efficaces telles que l’irrigation au goutte-à-goutte.

Accélérant le processus naturel de changement génétique, l’irradiation par rayons gamma et par rayons X est utilisée dans la sélection des plantes par mutation pour développer de nouvelles variétés de cultures résistantes ou tolérantes à la sécheresse, à la salinité, aux maladies et aux ravageurs. Les graines et autres matériels végétaux sont traités pour produire des changements génétiques semblables à des mutations spontanées, ce qui permet d’obtenir des variétés améliorées aux rendements élevés, mieux adaptées aux changements climatiques.

Pour en savoir plus sur l’utilisation des techniques nucléaires favorisant une agriculture intelligente face au climat, cliquez ici.

Étudier les océans

Les océans absorbent le quart du CO2 libéré dans l’atmosphère, stockant 50 fois plus de CO2 que l’atmosphère. L’augmentation du niveau de CO2 entraîne l’acidification des océans, qui peut affecter les organismes marins non habitués à l’acidité et perturber des écosystèmes entiers, la chaîne alimentaire et finalement la subsistance des communautés qui dépendent des océans. Si l’eau devient trop acide, les conditions deviennent destructrices pour les organismes.

On utilise des techniques nucléaires et isotopiques pour étudier les océans et leur acidification. Elles permettent d’évaluer la capacité de stockage du carbone des océans, l’effet de l’acidification sur les organismes marins, l’évolution passée de l’acidité des océans et les incidences sur les scénarios climatiques futurs. Les radio-isotopes stables et naturels servent à comprendre le cycle du carbone, notamment l’origine et le devenir de la matière organique.

Les scientifiques et les décideurs politiques peuvent ainsi mieux réagir aux changements et protéger la vie océanique.

Pour plus d’informations sur les différentes techniques employées pour comprendre les océans, cliquez ici.

Comprendre les réserves d’eau

Le changement climatique affecte les sources et la distribution des précipitations partout dans le monde, entraînant des modifications des débits fluviaux et de la reconstitution des eaux souterraines. L’hydrologie isotopique permet de comprendre comment les aquifères souterrains se reconstituent et combien ils sont vulnérables au changement climatique. Ces données aident à protéger et à préserver les systèmes d’eaux souterraines.

L’hydrologie isotopique permet d’étudier la composition isotopique de l’hydrogène et de l’oxygène dans l’eau. Puisque la composition isotopique de l’eau est caractéristique du moment et de l’endroit d’où provient la pluie, cette technique permet de déterminer d’où vient l’eau et de protéger sa source.

D’autres isotopes servent à dater l’âge de l’eau contenue dans différents systèmes aquifères. En évaluant l’âge de l’eau, les scientifiques comprennent comment gérer au mieux l’approvisionnement en eau afin d’en assurer la durabilité à long terme.

Pour en savoir plus sur l’hydrologie isotopique, cliquez ici.

Quel est le rôle de l’AIEA ?

 

Pour en savoir plus sur la technologie nucléaire et son lien avec le changement climatique, lisez cette édition du Bulletin de l’AIEA.

Cet article a été publié pour la première fois sur iaea.org/fr le 6 octobre 2021.
 

What are isotopes?

The atoms of each chemical element have a characteristic number of protons, neutrons and electrons.

Atoms with the same number of protons but different number of neutrons are isotopes, which share almost the same chemical properties but differ in mass and physical properties. There are stable isotopes – they do not emit radiation – and there are unstable, radioactive isotopes.

Different nuclear techniques are used to measure the isotopes’ amounts and proportions and to trace their origin, history, sources and interactions in the environment. Through these measurements, experts can gain a better understanding of the functioning of various ecosystems.

Learn more about isotopes and their uses here.

Reducing emissions in agriculture

A quarter of greenhouse gas emissions originate in agriculture, including through the release of CH4 and N2O – a gas 300 times more potent than CO2 in terms of leading to global warming – from livestock and chemical fertilisers. Excess fertiliser turning into N2O not only contributes to global warming but also pollutes soil and fresh water. Nuclear techniques are helpful to assess emissions of greenhouse gases in quantity and quality.

Isotopes can help identify the amount of fertiliser that plants take up and, therefore, reduce the amount of fertiliser applied and the volume of N2O released.

See this article on reducing greenhouse gas emissions with nuclear techniques for more details.

Strengthening crop production

Climate change has led to extremely dry conditions in many countries, making it important to understand how drought is affecting the growth of crops under these new conditions and to help find ways to save water. See why water matters.

Isotopes are used in assessing the status and movement of water in soil to understand how strong crops can be produced under changing conditions. They help communities adapt to dry conditions and successfully use cheaper and more effective methods such as drip irrigation.

By speeding up the natural process of genetic change, gamma and X-ray irradiation are used in plant mutation breeding to develop new crop varieties resistant or tolerant to drought, salinity, disease and pests. Seeds and other plant material are treated to induce genetic changes similar to spontaneous mutations, resulting in improved varieties of high yield and crops better adapted to climate changes.

Read more about the use of nuclear techniques for climate-smart agriculture.

Studying oceans

The ocean absorbs one quarter of CO2 released in the atmosphere, allowing 50 times more CO2 to be stored in the ocean than in the atmosphere. Increased amounts of CO2 lead to ocean acidification, which can affect marine organisms that are not used to acidic conditions, impacting entire ecosystems, the food chain and eventually livelihoods of communities dependent on the ocean. When the water becomes too acidic, conditions become destructive to organisms.

Nuclear and isotopic techniques are used to study the ocean and ocean acidification. They help evaluate the ocean’s capacity to store carbon, acidification’s impact on marine organisms, past changes in ocean acidity and impacts on future climate scenarios. Stable and naturally occurring radioisotopes are used to understand the cycling of carbon, including the sources and fates of organic matter.

Armed with this understanding, scientists and policy makers are in a better position to react to the changes and protect life in the ocean.   

Further information on the different techniques used to understand oceans can be found here.

Understanding water reserves

Climate change affects the sources and distribution of rain worldwide, leading to changes in river flow and in the replenishment of groundwater. Isotope hydrology is used to understand how groundwater aquifers are replenished and how vulnerable they may be to climate change. This data helps protect and conserve groundwater systems.

Isotope hydrology examines the isotopic composition of hydrogen and oxygen in water. Because the isotopic makeup of water is unique with respect to the time and location of the rain from where the water originates, this technique can track where the water comes from, so its source can be protected.

Other isotopes are used to date the age of water hosted in different aquifer systems. By evaluating the age of water, scientists can understand how to best manage water supplies to ensure their long-term sustainability.

Find out more on the use of isotope hydrology.

What is the role of the IAEA?

  • The IAEA uses nuclear science and technology to help countries monitor, mitigate and adapt to climate change. It gives guidance on how to preserve and restore the environment, as well as disseminate research and information to aid policy making.
  • The Joint FAO/IAEA Centre of Nuclear Techniques in Food and Agriculture works to develop and further improve nuclear and isotopic techniques to intensify agricultural production and preserve natural resources, while the IAEA builds the capacity of experts around the world in the use of these techniques.
  • The IAEA maintains the Ocean Acidification International Coordination Centre, advancing capacity building and global communication in ocean acidification science.
  • IAEA’s Environment Laboratories use nuclear and isotopic techniques to better understand the global carbon cycle, study the ocean’s carbon storage capacity and its impacts on future climate scenarios.
  • Partnering with the World Meteorological Organization, the IAEA operates the Global Network of Isotopes in Precipitation, which contains scientific advice, logistics and technical support in isotope hydrology.

To find out more about nuclear technology and its relation to climate change, read this edition of the IAEA Bulletin.