Des scientifiques de 40 pays bénéficient de la formation en ligne de l’AIEA sur l’activation neutronique

Que ce soit pour résoudre des affaires criminelles qui ont marqué l’histoire, pour trouver ce qu’il y a derrière l’effacement progressif d’une plage en Jamaïque ou pour déterminer la qualité de l’air dans votre salle de sport, l’activation neutronique est une méthode reconnue qui permet de révéler la composition et l’origine des matériaux.

Analyse de répliques de céramiques anciennes mochica par activation neutronique. (Photo : Institut péruvien de l’énergie nucléaire, Pérou)

Que ce soit pour résoudre des affaires criminelles qui ont marqué l’histoire, pour trouver ce qu’il y a derrière l’effacement progressif d’une plage en Jamaïque ou pour déterminer la qualité de l’air dans votre salle de sport, l’activation neutronique est une méthode reconnue qui permet de révéler la composition et l’origine des matériaux. Grâce à un outil d’apprentissage en ligne élaboré par l’AIEA, les chercheurs de 40 pays sont en train de s’y former.

L’activation neutronique est un type d’analyse couramment employé dans près de la moitié des 238 réacteurs de recherche en exploitation dans le monde ainsi que dans certains générateurs de neutrons alimentés par accélérateur. Cette technique très sensible peut détecter la concentration d’un seul atome sur un million, sans que cela conduise à l’altération ni à la destruction du matériau examiné. Du fait de sa précision, elle offre plusieurs avantages par rapport à d’autres méthodes d’analyse et elle est particulièrement utile pour les analyses globales et l’étude de matériaux singuliers dont on doit préserver l’intégrité.

La technique consiste à irradier des atomes stables par un flux de neutrons, puis à mesurer la décroissance, ou le rayonnement, des éléments de l’échantillon. Les scientifiques s’en servent pour trouver la signature chimique de divers matériaux : plastiques, métaux, verre ou particules du sol et de l’air, pour n’en citer que quelques-uns.

« Aujourd’hui, les principaux champs d’application de cette méthode sont les sciences environnementales, l’archéologie, le patrimoine culturel et même la criminalistique », précise Nuno Pessoa Barradas, spécialiste des réacteurs de recherche à l’AIEA. « Les chercheurs qui travaillent dans ces domaines n’ont cependant pas toujours des connaissances en physique nucléaire ; ils ne sont donc pas forcément en mesure d’exploiter tout le potentiel de cette technique. »

Renforcer les connaissances

Afin de combler le manque actuel de connaissances et de répondre à une demande croissante dans ce domaine, l’AIEA, par l’intermédiaire du projet de coopération technique « Constitution de réseaux pour des programmes de formation théorique et pratique et de sensibilisation à la science et à la technologie nucléaires », a conçu une formation en ligne sur l’analyse par activation neutronique. Lancée à la fin de 2017, celle-ci s’adresse à la fois aux novices et aux spécialistes.

En octobre 2018, un objectif décisif a été atteint : en moins d’un an, on a enregistré des inscriptions à la formation dans 40 des 52 pays possédant des réacteurs de recherche en service. Plusieurs établissements se servent de cet outil pour former du personnel et des étudiants, y compris au niveau universitaire.

« Nous sommes confrontés à une forte rotation du personnel et la formation des nouveaux venus exige beaucoup de temps, en particulier dans un domaine aussi spécialisé », explique Katalin Gméling du Centre hongrois de recherche sur l’énergie. « La formation en ligne donne accès à une foule d’informations qui permettent aux nouveaux employés de se familiariser avec le sujet et au personnel chevronné de rafraichir ses connaissances. »

Découverte en 1935 par le chimiste d’origine hongroise George de Hevesy et la physicienne germano-danoise Hilde Levi, l’activation neutronique s’est imposée à l’origine comme un outil utile pour mesurer la masse d’éléments de terres rares.

Au cours des dernières décennies, on a découvert que cette méthode pouvait avoir d’autres applications, par exemple pour apporter de nouveaux éléments de preuve dans des affaires criminelles historiques. En 2013, on s’en est servi pour analyser des poils de moustache afin de réfuter la théorie selon laquelle Tycho Brahe avait été empoisonné au mercure. Au décès de ce membre de la noblesse danoise, c’est son assistant et principal suspect, le mathématicien et astronome Johannes Kepler – célèbre pour avoir découvert les lois du mouvement des planètes – qui avait hérité de ses précieuses notes.

Récemment, à la suite du vol d’une quantité de sable équivalant à 500 chargements de camions sur la plage de Coral Springs en Jamaïque, les autorités locales ont collaboré avec le Centre international de sciences environnementales et nucléaires pour appliquer la méthode de l’activation neutronique. Il a ainsi été possible d’analyser l’origine du sable de plusieurs plages susceptibles d’avoir récupéré une partie du sable dérobé, ce qui a permis de fournir de nouveaux éléments de preuve.

Aujourd’hui, l’activation neutronique sert également à effectuer des recherches et des tests sur la qualité de l’air intérieur (dans les écoles ou les centres de mise en forme, par exemple), l’objectif étant de déterminer la quantité et l’origine des polluants présents dans l’air.

À l’occasion d’un atelier organisé en septembre 2018 au Siège de l’AIEA à Vienne, on a procédé à une révision de la formation en ligne sur l’analyse par activation neutronique.

« Cette formation est pensée comme un outil évolutif qui peut être constamment mis à jour et enrichi au fur et à mesure des avancées réalisées dans le domaine, avec l’ajout de différents protocoles de laboratoire et domaines de recherche », souligne Nuno Pessoa Barradas. La première version remodelée devrait être mise en ligne au début de 2019.

Building knowledge

In order to bridge this knowledge gap and address a growing demand, the IAEA, through the technical cooperation project Networking for Nuclear Education, Training, and Outreach Programmes in Nuclear Science and Technology, designed an e-learning course on neutron activation analysis. Launched in late 2017, the tool caters to both newcomers and specialized, advanced professionals.

This month the online training course reached a landmark target, with participants in 40 of the 52 countries with operating research reactors signing up for it in less than a year. Several institutes use the tool in the education of staff and students, including at university level.

“We face frequent changes of employees and the training of new staff is quite time consuming, especially in such a specialized field,” said Katalin Gméling from the Hungarian Centre for Energy Research. “The e-learning material offers a great collection of information to train newcomers and refresh the knowledge of senior staff.”

Discovered in 1935 by Hungarian-born chemist George de Hevesy and German-Danish physicist Hilde Levi, neutron activation originally became a useful tool to measure the mass of rare earth elements.

In the last decades, the method found several other uses, including to provide additional evidence to historical criminal cases. In 2013, using a moustache hair as a starting point, neutron activation was used to disprove the theory that mercury poisoning killed Danish nobleman Tycho Brahe, whose valuable notes were inherited and explored by his assistant (and alleged prime suspect): mathematician and astronomer Johannes Kepler, the discoverer of planetary motion laws.  

More recently, following the theft of an estimated five-hundred truckloads of beach sand from the Coral Springs beach in Jamaica, local authorities teamed up with the International Centre for Environmental and Nuclear Sciences to apply neutron activation to test the origin of sand in suspected receptor beaches, providing additional evidence to the case.

Today, neutron activation is a method used to research and test indoor air quality, for example at schools and fitness centres, by helping to determine the quantity and origin of pollutants in the air.

The neutron activation analysis e-learning tool was reviewed at a workshop last month at the IAEA headquarters in Vienna. “The tool is intended as a living book that can be constantly updated and extended as this field evolves to include different laboratory protocols and research areas,” Barradas said. The launch of a first revision is planned for early 2019.